Madagascar : les origines d’une crise qui dégénère
Le bras de fer entre le président de l’île et le maire de la capitale menace la stabilité du pays. Retour sur les origines d’une crise politique qui remonte au 13 décembre 2008.
Madagascar s’enfonce dans la crise. La police tire désormais à balles réelles sur les manifestants. Samedi 7 février, des partisans de l’opposition, qui manifestaient contre le gouvernement du président malgache, Marc Ravalomanana, dans la capitale Antananarivo, ont essuyé des tirs venant des forces de l’ordre, selon l’AFP.
En fin d’après-midi, les pompiers comptabilisaient au moins 23 morts et 83 blessés. Dans la journée, le maire de la capitale, Andry Rajoelina, avait annoncé qu’il prenait la tête d’une Haute autorité de transition, après s’être autoproclamé en charge de la conduite du pays, le 31 janvier dernier.
Tout commence le 13 décembre 2008. Viva, chaîne de télévision du maire d’Antananarivo, diffuse un entretien avec l’ancien président malgache, Didier Ratsiraka, très critique envers l’actuel chef de l’Etat. Ravalomanana en prend ombrage et interdit la chaîne. Andry Rajoelina lui lance alors un ultimatum qu’il ignore. Le maire convoque des manifestations de ses partisans et lance un appel à la « grève générale ».
Depuis, les tensions s’accumulent. Les 26 et 27 janvier, des pillages font près de 39 morts, selon la gendarmerie. Depuis, Andy Rajoelina tente de s’imposer comme l’homme fort de la situation, seul à même de ramener le calme dans la capitale. (Voir la vidéo)
Un conflit de personnalités
Malgré les apparences, les deux hommes ne sont pas si différents. Le président et le maire sont protestants, membres de l’ethnie Merina. Des hommes d’affaires passés par la mairie d’Antananarivo (Ravalomanana était maire de la capitale avant d’être élu à la présidence en 2002).
Mais Andry Rajoelina n’est soutenu par aucun mouvement politique fort et bien qu’il guigne la place de son rival, il n’a pas l’âge requis. A Madagascar, il faut avoir 40 ans pour être candidat à la présidentielle. Il n’en a que 34. Pour les observateurs, il s’agit d’un conflit de personnalités.
« Ras-le-bol général »
Après bientôt sept ans au pouvoir, l’opposition fait de nombreux reproches à Marc Ravalomanana, 59 ans. Il favoriserait la capitale et le centre de l’île aux dépens du reste du pays. On le soupçonne de dérive autoritaire depuis un référendum qui, en 2007, lui a accordé la possibilité de gouverner par ordonnance « en cas d’urgence ou de catastrophe ».
Le président est aussi accusé de s’être enrichi au pouvoir. En s’accordant des cadeaux fiscaux (en supprimant des droits de douanes sur des produits importés par sa société d’agroalimentaire, Tiko), en prenant possession d’un groupe de BTP, d’un réseau de supermarchés, d’une chaîne de télévision…
D’où un certain « ras-le-bol général », selon Jean-Michel Wachsberger, chercheur à l’Institut de recherche pour le développement (IRD), cité par Mediapart. L’île est habituée aux crises politiques (1972, 1991, 2002). Mais cette fois, les violences dont le pays est le théâtre n’augurent rien de bon.
À lire ailleurs
- Chronologie détaillée des évènements sur Le Monde.fr
Ajoutez votre commentaire !